Elevage

Les apports de l’élevage à l’agrosystème oasien
L'agrosystème oasien a permis de longue date de pratiquer un élevage diversifié, grâce aux cultures qu'il abrite et à la valorisation de ses sous-produits. L’élevage est ainsi une composante essentielle des systèmes de production d’oasis. Par sa production de fumier, il garantit le maintien de la fertilité des sols de l’oasis soumis à des pratiques culturales très intensifiées. En plus de ses productions directes de lait, de viande, l’animal de l’oasis fournit une force de traction importante pour l’exhaure de l’eau, les transports et parfois les travaux agricoles. Le système petits ruminants-légumineuses, atteint des niveaux de productivité élevés, les relations entre activités agricoles et élevage intensifié sont multiples et deviennent rapidement synergiques. Les agriculteurs-éleveurs des oasis du sud du Maroc maîtrisent depuis longtemps cette association qu’ils valorisent de façon optimale grâce à la race ovine d’Mane parfaitement adaptée à ces systèmes d’élevage intensifiés. D’autres formes d’élevage intensif sont pratiquées dans les oasis du pourtour saharien, les plus performantes sont celles qui valorisent sur place, par de petits élevages familiaux, les productions fourragères de l’oasis.
Source : DOLLE V. 1990. Elevage intensif en oasis, une composante importante du système de production. In Dollé V. (ed.), Toutain G. (ed.). Les systèmes agricoles oasiens. Montpellier: CIHEAM, 1990. p. 195-204 (Options Méditerranéennes: Série A. Séminaires Méditerranée. Link: http://ressources.ciheam.org/om/pdf/a11/CI901495.pdf

TYPOLOGIE

L'animal comme force de travail dans les systèmes oasiens
Ill. Oasis de Gabès (Tunisia)
Le maintien d’une activité oasienne florissante est pour beaucoup de pays des zones aride et semi-aride, indispensable à un développement harmonieux. Les productions animales dans leurs diversités ne peuvent être ignorées ou oubliées dans ce processus …/… Le rôle de l’animal en tant que fournisseur de force motrice est toutefois sensiblement différent selon le type d’oasis.
*Dans les oasis des vallées des grands fleuves allogènes, les animaux de traits (dromadaires, anes mais aussi buffles) sont utilisés pour les travaux d’exhaure de l’eau, pour le transport (bât ou charette), et pour les travaux agricoles (labour, hersage, sarclage, mise en boue des casiers rizicoles). Le cheptel de ces immenses oasis est important (3,3 à 4 millions UBT sur la vallée du Nil en Egypte). Les productions animales autres que celles destinées à la force de traction sont très importantes dans la vallée.
*Dans les oasis caravanières, l’activité caravanière a pratiquement disparu. Les espèces animales présentes sont moins nombreuses, les bovidés sont totalement absents, les asins peu nombreux, seuls les camélins assurent la majeure partie de la force de travail nécessaire à l’exhaure de l’eau et au transport dans l’oasis (la pompe à moteur thermique ou quelquefois éolien tend à remplacer l’exhaure animale). Les camelins et les petits ruminants assurent l’approvisionnement de l’oasis en produits laitiers et en viande.
*Dans les bas-fonds sahéliens, la force de travail pour l’exhaure de l’eau est fournie par les dromadaires, mais aussi par les bœufs de traits. Les surfaces mises en cultures de contre saison sont insuffisantes pour permettre l’utilisation de la traction animale. Les troupeaux de bovidés (zébus) sont nombreux autour de ces bas-fonds, autrefois pâturages de saison sèche. Le développement de ces activités agricoles ne manque pas d’inquiéter les éleveurs transhumants et quelquefois d’être la source de conflits entre pasteurs et agriculteurs.
*Dans les oasis de plantation, la traction animale a pratiquement disparu, l’exhaure de l’eau y est généralement assurée par de puissantes motopompes à très hauts débits et les véhicules moyens ou gros porteurs transportent les denrées nécessaires à la vie de l’oasis et repartent avec les produits des plantations. Dans ce type d’oasis pourraient se développer des systèmes de production animale plus modernes (production laitière ou embouche) utilisant les sous-produits agro-industriels de ces plantations.
Source : BOURZAT D., GOE M.R. 1990. L'animal, force de travail dans les systèmes oasiens, In Dollé V. (ed.), Toutain G. (ed.). Les systèmes agricoles oasiens. Montpellier: CIHEAM, 1990. p. 249-260 (Options Méditerranéennes: Série A. Séminaires Méditerranée. Link : http://ressources.ciheam.org/om/pdf/a11/CI901500.pdf

 

PASTORALISME

L’agrosystème oasien et le réchauffement climatique
Dans les zones arides devenues semi-désertiques, l'oasis peut-elle devenir le point d'ancrage d'une nouvelle organisation pastorale ? Dans l'histoire, les palmeraies ne se sont pas étendues vers le Sud, pourtant les ressources en eau bien exploitées auraient permis d'y associer une agriculture oasienne de type maraîchage, céréales ou élevage. Les problèmes posés par la désertification des milieux fragilisés, en déséquilibre, l'évolution du pastoralisme, qui, après les sécheresses, se sédentarise partiellement, et les nouveaux modes d'occupation de l'espace peuvent, peut être, trouver des réponses dans un modèle oasien permettant une sécurité alimentaire et un intérêt économique.
Le Sahel, le «rivage» du désert, est cette longue bande territoriale qui traverse l’Afrique, au sud du Tropique du Cancer, de l’Atlantique au Soudan, caractérisée principalement par la semi-aridité et par la décroissance des pluies lorsque l’on va du Sud vers le Sahara. A partir, en gros, de l’isohyète de 300 mm, se distingue une frange plus sèche, celle du Sahel «pastoral» : l’agriculture y est aléatoire, sinon impossible sans irrigation, l’élevage pastoral constitue la principale activité économique. …/… L’évolution récente du pastoralisme sahélien montre que l’adaptation aux conditions nouvelles est en train de se faire, en effet un nouveau mode d’occupation de l’espace se dessine ; le point d’ancrage autour d’un habitat fixe semble en être une composante déterminante …/… Les populations pastorales réalisent aujourd’hui que le système traditionnel ne leur permet pas, et ne leur permettra probablement plus, de vivre dans des conditions acceptables. Les bonnes pluies, le retour de l’herbe ne sont désormais une aubaine que pour les mieux nantis, ceux qui disposent du capital nécessaire à la reconstitution d’un troupeau et qui peuvent accepter les risques de l'élevage. Tout indique, en revanche, que les populations pastorales sont désormais prêtes à adopter un système économique différent. Les évolutions spontanées, observables en Mauritanie, au Mali, au Niger et dans d’autres parties du Sahel en montrent les principales modalités:
*le rayon de déplacement des troupeaux est réduit et des efforts sont faits pour tenter de protéger les pâturages de saison sèche de «l’invasion» des troupeaux étrangers ;
*la composition des troupeaux est modifiée, les pasteurs tendant à privilégier les chèvres et les chameaux et à abandonner les bovins.
*les familles, par ailleurs, se fixent, en partie, autour des points d’eau ; elles y construisent un habitat en dur et entreprennent de développer une petite base agricole, généralement limitée, faute d’alternative, au maraîchage.
*les activités économiques se différencient, notamment par la création de services dans les zones de fixation et par la migration temporaire de certains travailleurs.
*une tendance, enfin, se dessine pour une participation beaucoup plus grande à l’économie du marché et pour une commercialisation plus systématique du bétail …/…
L’oasis est, on l’a vu, possible dans le Sahel pastoral. Pourquoi son modèle n’inspirerait-il pas le développement des «centres de fixation» autour desquels la vie pastorale se réorganise actuellement ?
Source : LAZAREV 1989. L'oasis. Une réponse a la crise des pastoralismes dans le Sahel? In Dollé V. (ed.), Toutain G. (ed.). Les systèmes agricoles oasiens. Montpellier: CIHEAM, 1990. p. 77-90 (Options Méditerranéennes: Série A. Séminaires Méditerranée. Link : http://ressources.ciheam.org/om/pdf/a11/CI901486.pdf

 

RESSOURCES

Ill. cultures fourragères dans l'oasis de Gabès (Tunisia)
Sans négliger l’alimentation humaine (autoconsommation), l’élevage dans l’oasis est surtout une source de fumure et de travail. L’alimentation constitue le principal frein au développement de l’élevage dans l’oasis sans oublier les troupeaux vivant en zone désertique autour de l’oasis. En l’absence de pâturage, il convient d’utiliser toutes les ressources végétales susceptibles de constituer des aliments pour le bétail, cela d’autant plus que l’oasis représente bien souvent une réserve fourragère pour les troupeaux nomades de la steppe.
*Afin de contribuer au développement économique de l’élevage oasien et de maintenir un équilibre végétal-animal indispensable à l’exploitation de ce système agricole …/… l’amélioration de l’élevage passe par l’alimentation. La présence de légumineuses et de ruminants étant indispensables pour garantir un bon fonctionnement du système de production oasien.
Source : TISSERAND 1990. Les ressources alimentaires pour le bétail. In Dollé V. (ed.), Toutain G. (ed.). Les systèmes agricoles oasiens. Montpellier: CIHEAM, 1990. p. 237-248 (Options Méditerranéennes: Série A. Séminaires Méditerranée. Link : http://ressources.ciheam.org/om/pdf/a11/CI901499.pdf
*Le peu de travaux réalisés sur l’étude de la valeur alimentaire des sous-produits du palmier dattier a été fait sur les rebuts de dattes (KHAL, 1982 RIHANI, 1985 et DJERROUDI, 1991), et les résultats obtenus par ces auteurs sont très variables, parfois même contradictoires. Ceci est lié à la diversité des variétés de dattes utilisées et aux conditions expérimentales de ces travaux. A partir de cela, on a jugé nécessaire de faire une étude complète de l’estimation du tonnage et de la valeur alimentaire, chez les ovins, de la totalité des sous-produits du palmier dattier pouvant être utilisés en alimentation du bétail (rebuts de dattes, palmes sèches et pédicelles de dattes), en utilisant les variétés de dattes les plus dominantes en Algérie, afin de rationaliser l’utilisation de ces sous-produits, et contribuer ainsi à combler le déficit en aliment du bétail dans les régions sahariennes …/…
*Toutefois, il faut noter que ces sous-produits, étant pauvres en azote, leur utilisation nécessite une complémentation ou un traitement azoté.
Source : CHEHMA A., LONGO HF., SIBOUKEUR 2000. Estimation du tonnage et valeur Alimentaire des sous produits du palmier dattier chez les ovins, in Recherche Agronomique 7, 7-15, INRAA. Link : http://www.webreview.dz/IMG/pdf/Estimation_du_tonnage_et_valeur_Alimentaire_des_sous_produits_Du_palmier_dattier_chez_les_ovins-2.pdf
Voir aussi : CHEHMA A., LONGO HF. 2001. Valorisation des Sous-Produits du Palmier Dattier en Vue de leur Utilisation en Alimentation du Bétail, in Rev. Energ. Ren. : Production et Valorisation – Biomasse, 59-64. Link : http://www.cder.dz/download/bio_8.pdf

 

PRODUCTIONS

 
La promotion de l’élevage ovin D’man dans les oasis du Sud Maroc
*Adaptation à l’agrosystème
Alors qu’elle présente des difficultés hors de sa zone d’origine, la race D’man évolue particulièrement bien dans les oasis : elle est adaptée aux conditions climatiques et résiste aux pressions sanitaires (les vallées sont le berceau de la race). L’élevage s’y conduit en stabulation et l’alimentation est constituée à base de luzerne et d’autres produits ou sous-produits tels que les déchets de dattes, le son de blé, l’orge… Ce mode de conduite est particulièrement adapté à la faible disponibilité en pâturage sur le territoire et permet une valorisation des ressources locales pour l’alimentation des animaux.
*Adaptation à la demande locale
De manière générale, la viande de mouton est très consommée dans les foyers marocains. L’élevage ovin présente donc un intérêt économique du fait de la forte demande sur les marchés. La race D’man est particulièrement appréciée pour la qualité de sa viande. Outre son intérêt économique, l’animal a une forte valeur sociale : il est présent dans toutes les cérémonies familiales (naissances, mariages) et dans les grandes fêtes religieuses (Aïd al Adha…).
*Complémentarité avec les productions végétales
Les systèmes agricoles oasiens sont basés sur de la polyculture associée au petit élevage. De nombreuses complémentarités entre les différents ateliers de production sont relevées:
– production fourragère sous les strates arborée et arbustive (dattiers et autres fruitiers) à destination de l’alimentation du troupeau ;
– utilisation d’une partie des céréales et de leurs pailles pour l’alimentation des ovins;
– valorisation des déchets de dattes ou des feuilles d’oliviers dans l’alimentation du troupeau ;
– restitution et maintien de la fertilité des parcelles par l’apport de fumier issu des ateliers d’élevage ;
– recours à l’une ou l’autre des trésoreries tirées des ateliers de production animale ou végétale pour couvrir les déficits de l’autre (équilibre d’exploitation).
Source : AGRISUD 2012. L’élevage ovin D’man en pratiques. Guide. Royaume du Maroc. Zone Oasienne. Provinces de Ouarzazate, Zagora et Tinghir, 98p. Link : http://www.agrisud.org/wp-content/uploads/2013/05/Guide_Maroc.pdf
 
En savoir plus:
CHATIBI S. 2011. La filière viande bovine au Maroc quelle place pour l’élevage traditionnel et quelles bases de qualification pour la viande locale ? Thèse de doctorat. Un. de Corse. 392p. Link : http://www.corte.inra.fr/lrde2/images/files/These_SAID.pdf
KIRAT S. 2006. Les conditions d'émergence d'un système d'élevage spécialisé en engraissement et ses conséquences sur la redynamisation de l'exploitation agricole et sur la filière des viandes rouges bovines – Cas de la wilaya de Jijel, en Algérie. Thèse de Doctorat. CIHEAM-IAMM Montpellier, 148p. Link: http://www.iamm.ciheam.org/ress_doc/opac_css/doc_num.php?explnum_id=4370

 
 

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